Une année comme pasteur des diocèses de Savoie

Installé depuis un an comme archevêque en Savoie, Mgr Verny dresse pour nous le bilan de ses douze premiers mois dans nos diocèses. Entretien.

Durant cette première année, quels ont été les moments les plus marquants pour vous ? Quel a été l’accueil des savoyards envers leur nouveau pasteur ?

J’avais à cœur de servir le diocèse d’un territoire qui ait du caractère et des traditions. J’ai été bien servi ! Je souhaitais aussi m’éloigner de Paris et de la région parisienne pour m’ancrer ailleurs, faire pousser de nouvelles racines. J’ai rencontré la Savoie à travers des personnes et des visages. L’accueil des savoyards a été patient et bienveillant, je vous en remercie. Et je n’ai pas fini d’apprendre !

J’ai en tête 1001 moments marquants. Si je devais en citer quelques-uns, ce serait bien sûr mes installations comme archevêque et évêque dans les trois cathédrales, mes rencontres personnelles avec chacun des prêtres, diacres et baptisés. Il y a aussi mes découvertes de la Savoie au travers de rencontres variées avec la société civile.

Un événement très marquant aussi a été l’installation de l’archevêque de Ouagadougou, Mgr Prosper Kontiebo. D’Eglise « fille » fondée par Mgr Thevenoud, j’ai découvert une Eglise « sœur », avec laquelle la Savoie est heureuse de cheminer.

Trois diocèses : quels sont les défis, opportunités ou contraintes que cela implique ?

Outre le côté atypique qui me donne le droit de voter trois fois à l’assemblée plénière de la Conférence des Evêques de France, c’est en effet une spécificité. Nos trois diocèses sont en quelque sorte un petit laboratoire pour l’Eglise de France : comment rapprocher sans fusionner, tout en respectant l’identité de chaque diocèse ? La Savoie est marquée par sa géographie, ses vallées, et la saisonnalité. La pastorale du tourisme a un rôle crucial à jouer, tant en hiver qu’en été.

Concrètement comme évêque, cela implique de nombreux déplacements pour être présent dans chacun des trois diocèses, ce qui n’est pas une mince affaire ! J’ai aussi réalisé cet été qu’il n’y a pas, dans nos diocèses touristiques, de période « off » pour souffler. L’Eglise de Savoie se doit d’être présente et accueillante pendant les vacances. Quant au reste de l’année, le rythme est bien soutenu comme tout diocèse. Tout cela fait un agenda très rempli !

D’évêque auxiliaire (pour le diocèse de Paris) à évêque : qu’est-ce que cela change ?

Il y a une relation particulière entre un évêque et un peuple, une terre, des communautés. On est donné l’un à l’autre, ce qui n’est pas directement le cas en tant qu’évêque auxiliaire. C’est un lien très fort et très beau.

Quelle a été votre première décision ?

Celle d’installer mon bureau à la maison diocésaine pour pouvoir être au contact des équipes, tout en conservant l’archevêché pour mon logement et les rencontres officielles. Cela a pris de cours les services, il a fallu repenser l’aménagement des bureaux qui reste en cours. Je suis heureux de pouvoir croiser régulièrement les baptisés en mission, échanger facilement avec eux au détour d’un couloir. Ma 2e décision a été la nomination du père Michel Euler comme vicaire général, puis du conseil épiscopal. Tout comme le signale la démarche synodale de l’Eglise, un évêque s’appuie sur les différents conseils pour discerner et décider.

Quelle est la situation du clergé en Savoie ? Quelle attention particulière portez-vous aux prêtres ?

Les français sont très sensibles à la culture du chiffre, et les catholiques à celle du nombre de prêtres en particulier. On me pose ainsi souvent la question « combien de prêtres en Savoie ? ». J’ai mis du temps à pouvoir répondre à cette question car il y a plusieurs réalités : les prêtres savoyards en activité, ceux qui le sont parce qu’ils rendent des services mais qui ont l’âge de la retraite, les religieux, les prêtres fidei donum, et je ne parle pas des prêtres en vacances ! La situation est fragile depuis plusieurs années. Mais je suis très touché par leur unité, leur générosité et leur charité. Les prêtres sont d’ailleurs les premiers à me le dire : leur unité est probablement le fruit de leur fragilité.

Il y a des vocations en Savoie, mon souhait est de les accueillir … en Savoie ! Il y a actuellement deux séminaristes qui cheminent, l’un qui rentre en 1re année et l’autre en dernière en vue du diaconat. Un autre jeune homme entame une année de propédeutique. Nous accueillons également Pierre-Emmanuel, diacre en vue du sacerdoce, dans l’intention d’être incardiné en Savoie. Il sera cette année sur la paroisse d’Aix-les-Bains. Je rends grâce et je vous demande de prier pour eux.

Concernant le presbyterium, je suis attentif à deux points : permettre à ceux qui le souhaitent de pouvoir vivre une vie fraternelle. Cela est déjà le cas dans certains presbytères comme à La Motte-Servolex. Ensuite, je tiens à continuer à rencontrer chacun régulièrement et avec mon vicaire général pour écouter leurs attentes, leurs souhaits et leurs interrogations.

Enfin, je souhaiterais vraiment que les 60 ans du diaconat permanent que nous allons fêter cette année, soit l’occasion de relancer les vocations diaconales. Trop souvent, les diacres ont été vus comme une rustine au manque de prêtres. Or on « est » avant de « faire ». Puissions-nous savoir appeler ! Souvenez-vous des ouvriers de la dernière heure : « Personne ne nous a appelé ». La moisson est abondante, mais si nous n’appelons pas, il y aura peu d’élus. 

Que retenez-vous de vos rencontres avec les communautés paroissiales, de l’engagement des laïcs, de la fréquentation des églises ?

J’ai été frappé par les belles réalités paroissiales. Je peux aussi affirmer que la beauté d’une communauté ne dépend pas de son nombre. J’ai célébré dans des petites communautés, et c’était aussi très touchant et profond. Je suis persuadé qu’il y a une urgence à former toujours plus les baptisés.

Il y a eu plusieurs recrutements ces derniers mois au diocèse (directeur immobilier, déléguée générale, responsable communication) : pourquoi ces postes ?

L’arrivée d’un expert en immobilier était incontournable pour assurer la gestion du patrimoine immobilier de nos diocèses, prendre les bonnes décisions, et accompagner les paroisses qui se retrouvaient souvent démunies pour gérer ces sujets, vastes et complexes.

J’ai également souhaité créer une mission de déléguée générale, confiée à une laïque qui connait déjà bien les rouages des diocèses, afin de renforcer la gouvernance autour du père Euler et de moi-même, avec les conseils et aussi les laïcs en mission qu’elle accompagne.

Enfin, le poste de responsable communication était vacant et le recrutement avait été mis en attente pour me laisser une marge d’appréciation à mon arrivée. Il y avait urgence à organiser, coordonner et fluidifier l’information pour faire porter la voix de l’Église en Savoie.

Quels sont les grands événements cette année ?

Je me réjouis de rencontrer, le 28 septembre, les équipes d’animation paroissiale, qui sont les serviteurs des paroisses. Comme grands événements, il y aura le Jubilé à Rome, que nous proposons de vivre avec les trois diocèses, du 21 au 26 avril. Trois semaines après, le 17 mai, nous aurons la joie d’accueillir à Chambéry la messe de béatification de Camille Costa de Beauregard, « père des orphelins », fondateur du Bocage, une magnifique figure de prêtre et d’éducateur. Une équipe d’organisation s’est mise en route. L’enjeu est de faire profiter à l’ensemble de la Savoie la grâce que représente une année sainte et une béatification. Et il y aura aussi tous les autres événements de la vie ordinaire. Dans le mot « routine », il y a le mot « route » : vivre avec vous la vie quotidienne que nous donne à goûter le Seigneur me réjouit.

Quelles vont être vos priorités en 2025 ?

Les chantiers sont nombreux : poursuivre la construction des pôles diocèsains, mettre en place et consolider les différents conseils (conseil de la vie religieuse, consulteurs…), visiter les paroisses où je ne suis encore pas allé, rencontrer de nouveau les prêtres et les diacres, poursuivre la réflexion autour de l’avenir de la maison diocésaine et du sanctuaire de Myans… J’aurai à cœur de vous partager, dans quelque temps, des axes spirituels pour notre Église de Savoie.

En attendant, je vous redis ma joie d’avoir été envoyé pour servir les trois diocèses de Savoie, et compte sur les prières de tous.

2 septembre 2024, mis à jour le 3 septembre 2024